Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/226

Cette page a été validée par deux contributeurs.

plation des soins et des caresses qu’elle leur donnait. Il regardait chaque enfant avec une attention attendrie et parlait à tous comme un homme en qui le sentiment paternel est déjà très-développé. Caroline, ignorant qu’en effet il était père, s’imagina en soupirant qu’il songeait aux joies futures de la famille.

Le jour suivant, quand elle eut vu sa sœur monter dans le wagon qui la reconduisait à Étampes, elle se sentit horriblement seule, et pour la première fois le mariage du marquis se présenta à sa pensée comme un désastre irréparable dans sa propre vie. Elle sortit vite de la gare pour cacher ses larmes ; mais dans la cour elle se trouva en face de M. de Villemer. — Eh bien ! lui dit-il en lui offrant son bras, vous pleurez ? Je m’attendais bien à cela, et j’ai voulu me trouver ici, où les prétextes ne manquent pas pour le public, afin de vous soutenir un peu dans ce chagrin si naturel, et de vous rappeler qu’il vous reste des amis sincères.

— Quoi ! vous êtes venu ici pour moi ? répondit Caroline en essuyant ses larmes. Ah ! je suis honteuse de ce moment de faiblesse. C’est de l’ingratitude envers vous qui avez comblé ma famille, qui la rapprochez de moi, et que je devrais bénir dans la joie au lieu de sentir le petit déchirement d’une séparation qui ne peut plus être de longue durée. Ma sœur pourra revenir souvent voir sa fille, que je verrai, moi, plus souvent encore. Non, non, je n’ai pas de chagrin ; je suis au contraire bien heureuse, et c’est grâce à vous !

Pourquoi donc pleurez-vous encore ? lui dit le mar-