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moindre inquiétude de la part de Caroline bouleverserait toutes les pensées de son frère.

Le duc, après avoir admiré sincèrement la pureté de leurs relations, commençait à s’en inquiéter. — Cela devient, se disait-il, un attachement si grave que l’on n’en peut plus prévoir les conséquences. Il eût bien mieux valu pour mon frère que cette passion fût assouvie. Aujourd’hui elle ne ferait plus obstacle à son avenir. Peut-on croire que la vertu ait tué l’amour ? Non, non ! la vertu en pareil cas, c’est de l’amour qui a doublé de puissance !

Le duc ne se trompait pas. Le marquis ne s’attristait nullement de la perspective d’un mariage qu’il était désormais bien résolu à ne pas contracter. Il s’affligeait seulement du changement que le séjour de Paris allait momentanément opérer dans ses relations avec mademoiselle de Saint-Geneix, dans leur libre fraternité, dans leurs études en commun, dans cette sécurité de tous les instants qui ne se retrouverait pas ailleurs. Il lui en parlait avec une grande tristesse. Elle éprouvait les mêmes regrets, et attribuait son propre chagrin intérieur à son amour pour la campagne et au dérangement d’une vie si noble et si douce.

Elle éprouva cependant une charmante surprise en arrivant à Paris. Elle y trouva sa sœur, qui l’attendait avec les enfants, et elle apprit que Camille se rapprochait d’elle. Elle allait habiter à Étampes une maisonnette moitié ville, moitié campagne, jolie, fraîche, en