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Elle était fille d’un gentilhomme de basse Bretagne fixé aux environs de Blois et d’une demoiselle de Grajac, originaire du Velay. Caroline connut à peine sa mère. Madame de Saint-Geneix mourut la troisième année de son mariage en donnant le jour à Camille et en faisant promettre à Justine Lanion de passer plusieurs années auprès de ses enfants.

Justine Lanion, femme Peyraque, était une robuste et honnête paysanne du Velay, qui consentit à rester huit ans chez M. de Saint-Geneix. Elle avait nourri Caroline, après quoi elle était retournée dans sa famille pour revenir bientôt donner le lait de son second enfant à la seconde fille de sa chère dame. Grâce à elle, Caroline et Camille connurent les soins et les tendresses d’une seconde mère ; mais Justine ne pouvait oublier son mari et ses propres enfants. Elle dut enfin retourner dans son pays, et M. de Saint-Geneix conduisit ses filles à Paris, où elles furent élevées dans un des couvents alors en vogue.

Comme il n’était pas assez riche pour vivre à Paris, il y loua un pied-à-terre et y vint deux fois par an, aux fêtes de Pâques et aux vacances. C’étaient aussi les vacances du digne homme. Il faisait des économies toute l’année pour n’avoir rien à refuser à ses filles dans ces jours de liesse patriarcale : ce n’étaient alors que promenades, concerts, séances dans les musées, excursions dans les châteaux royaux, dîners friands, véritables parties fines de la vie la plus paternelle et la plus naïve, mais aussi la plus imprudente qui fut ja-