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devant lui, rougissant de paraître hors d’état de travailler.

Le duc s’arrêta pour le regarder avant de lui adresser la parole. Sa pâleur mate et ses yeux creusés par la douleur l’émurent profondément. Il allait lui tendre la main, lorsque le marquis se leva et lui dit d’un ton grave : — Mon frère, je vous ai beaucoup offensé il y a une heure. J’ai été injuste probablement, et dans tous les cas je n’avais pas le droit de remontrance envers vous, moi qui, n’ayant aimé qu’une femme en ma vie, me suis rendu coupable de sa perte et de sa mort. Je reconnais donc l’absurdité, la dureté, la vanité de mes paroles, et je vous en demande sincèrement pardon.

— Eh bien ! je t’en remercie de toute mon âme, répondit Gaëtan en lui serrant les deux mains, tu me rends grand service, car j’étais résolu à te faire des excuses. Si je sais de quoi par exemple, je veux que le diable m’emporte ! Mais je me suis dit qu’en luttant avec toi sous ces arbres je t’avais excité les nerfs. Je t’ai fait du mal peut-être, j’ai la main dure… Pourquoi ne me parlais-tu pas ?… Et puis… et puis… Tiens, je t’avais fait bien souffrir, et peut-être depuis longtemps, sans le savoir ; mais je ne pouvais pas deviner… J’aurais pourtant dû deviner cela, et de cela je te demande sincèrement pardon, moi aussi, mon pauvre frère !… Ah ! pourquoi as-tu manqué de confiance en moi après ce que nous nous étions juré ?

— Avoir confiance en toi ! reprit le marquis ; eh !