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trop ce que je dois à la dignité de votre maison et au repos de votre vie.

— Oui, oui, mon ami ! Je sais aussi, moi, que je peux être tranquille sur une question d’honneur et de délicatesse quand c’est à vous que j’ai affaire ; aussi je peux vous dire que cette petite d’Arglade m’a trouvé une perle, un diamant, et que, pour commencer, ce phénix m’a fait faire des folies !

La marquise raconta son entretien avec Caroline et fit ainsi son portrait. — Elle n’est ni grande ni petite, elle est très-bien faite, des pieds mignons, des mains d’enfant, des cheveux blond cendré en quantité, un teint de lis et de roses, des traits exquis, des dents de perles, un petit nez très-ferme, de beaux grands yeux vert de mer qui vous regardent tout droit sans hésitation, sans rêvasserie, sans fausse timidité, avec une candeur et une confiance qui plaisent et engagent ; rien d’une provinciale, des manières qui en sont d’excellentes à force de n’en être pas ; beaucoup de goût et de distinction dans la pauvreté de son ajustement ; enfin tout ce que je craignais et pourtant rien de ce que je craignais, c’est-à-dire la beauté qui m’inspirait de la méfiance et aucune des afféteries ou des prétentions qui eussent justifié cette méfiance-là ; de plus, une voix et une prononciation qui font de sa lecture une vraie musique, un solide talent de musicienne, et par-dessus tout cela toutes les apparences, tous les signes évidents de l’esprit, de la raison, de la sagesse et de la bonté ; si bien qu’inté-