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avait grandi dans l’opinion du monde, et on lui pardonnait d’avoir porté autrefois le trouble et le scandale dans plusieurs familles en voyant qu’il expiait sa vie ardente et sans frein avec courage et fierté. Il avait donc saisi avec esprit le rôle qui lui convenait désormais mais il y avait un repentir qui troublait son équilibre, et il s’agitait autour de ce repentir avec moins de clairvoyance et de résolution que s’il se fût agi de lui-même. Foncièrement bon dans son manque de raison, il cherchait ce qu’il pourrait faire pour rendre son frère heureux. Tantôt il se persuadait qu’il fallait mettre l’amour dans sa vie de recueillement et de médiocrité, tantôt il pensait à le lancer dans l’ambition, en brusquant ses répugnances et en cherchant de nouveau à lui suggérer l’idée d’un grand mariage.

Ce dernier parti était aussi le rêve de la marquise. Elle l’avait toujours caressé et s’y livrait plus que jamais, croyant que son enthousiasme maternel pour la générosité du marquis serait partagé par quelque héritière accomplie. Elle confia au duc qu’elle était en pourparlers avec son amie la duchesse de Dunières, pour faire épouser au marquis une Xaintrailles, orpheline très-riche et réputée belle, qui s’ennuyait au couvent et se montrait pourtant exigeante sur le mérite et la qualité. D’après tous ses renseignements, l’affaire était possible mais il fallait qu’Urbain s’y prêtât, et il ne s’y prêtait pas, disant qu’il ne saurait jamais se marier, si l’occasion ne venait le trouver, et qu’il était