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moment où je me rappelle que vous êtes comme moi un enfant du peuple et ma sœur, par conséquent, plus que cette patricienne, je peux vous dire que je m’intéresse personnellement à vous plus qu’à elle. C’est donc pour vous plus que pour elle que je redemande ses lettres.

MYRTO. — Ah ! tu vas les avoir, merci ! sois béni ! Dis-moi que tu m’aimes, et ma vengeance tombe à tes pieds !

FLORENCE. — Te dire que je t’aime, pauvre fille ! Comme tu l’entends, non ! Abuser de ce mot-là avec toi, ce serait faire déborder la coupe de ton châtiment.

MYRTO. — Eh bien, vous ne les aurez pas, les lettres ! Non, non, allez-vous-en ! Je pars et je les emporte !

FLORENCE. — Adieu donc, Myrto ! Mais je vous avertis qu’après cette vengeance-là vous êtes perdue, vous n’êtes plus digne de pitié ; vous n’êtes plus seulement débauchée, vous êtes méchante, et c’est encore ce qu’il y a de plus effrayant et de plus répulsif chez une femme !




SCÈNE VIII


Chez Jacques


RALPH, DAMIEN, EUGÈNE, MAURICE, LE CURÉ DE NOIRAC.

RALPH. — Sur ce chapitre-là, mes enfants, puisque vous voulez absolument que je parle, moi qui aime beaucoup à me taire et qui me laisse volontiers intimider par un auditoire de quatre personnes, j’aurai pourtant le courage de m’expliquer et de vous dire que je suis plus compétent que vous tous.

EUGÈNE. — J’en étais sûr ! Il n’est rien de tel que l’eau qui dort ! Vous l’ai-je dit, que l’Anglais était un homme très-passionné, et qu’il avait plus de noms de femmes inscrits sur l’ongle de son petit doigt qu’il n’en tiendrait dans toutes nos archives ?