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parler, qu’il se grisa avec son imagination en buvant du lait, et alla dormir, de guerre lasse, dans le chalet de Zemmi. Plus calme, je résistai mieux, et je marchai encore autour de la Quille, où se reposaient Félicie et Tonino, bien abrités du vent et du soleil, dans un creux pratiqué sans doute à cet effet par les bergers.

Je ne songeais certes pas à les observer. Le hasard me fit surprendre une petite scène d’intimité qui s’empara de mon attention.

Félicie Morgeron était assise sur l’herbe, et ses grands yeux bleus semblaient planer sur l’horizon. Tonino, couché auprès d’elle dans l’attitude du sommeil, avait les yeux ouverts et la regardait avec une expression à la fois extatique et mutine. Il tenait une de ses tresses pendantes, et, au moment où je passais derrière eux, il colla cette tresse à sa bouche et l’y garda. Félicie ne s’en aperçut pas d’abord, et, quand elle s’en aperçut, elle la lui retira brusquement et lui porta un soufflet qu’il para avec ses mains. Elle insista et le frappa sur la tête en le traitant d’imbécile. Il me sembla pourtant qu’elle n’y mettait pas de sévérité bien réelle et qu’un sourire mal dissimulé tempérait sa feinte colère. Quant à lui, il riait, ne paraissait ni honteux, ni repentant, ni effrayé de s’être trahi, et il cherchait à saisir la main qui le corrigeait.

Je ne sais si Félicie vit que j’étais là, mais tout à coup elle parut fâchée et ordonna au jeune homme