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— J’ai essayé de trouver le châtiment qui moralise, je n’en ai jamais conçu d’autre.

— Quel est-il ? L’abandon ?

— Non.

— Le mépris ?

— Encore moins.

— La haine ?

— L’amitié !

On se regarda ; les uns riaient, les autres ne comprenaient pas.

— Je vous parais insensé ou niais, reprit tranquillement M. Sylvestre. Eh bien, avec l’amitié envisagée comme châtiment, on pourrait moraliser les natures accessibles au repentir ; mais ceci demanderait de trop longues explications : il est dix heures, et je ne veux pas inquiéter mes hôtes. Je vous demande la permission de m’esquiver.

Il le fit comme il le disait, sans qu’il fût possible de le retenir. On n’attacha pas une grande importance à ses paroles. On pensait qu’il se tirait d’affaire par un paradoxe quelconque, ou que, comme un vieux sphinx, il nous jetait, pour masquer son impuissance, une énigme dont il ne tenait pas le mot.

Je l’ai comprise plus tard, cette énigme de M. Sylvestre. Elle est aussi simple, je dirais presque aussi puérile que possible, et cependant, pour me l’expliquer, il dut entrer dans des considérations qui m’ont paru instructives et intéressantes. C’est pourquoi j’ai écrit le récit qu’il fit un mois plus tard à