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faisons pas un devoir de l’ignorer et un mérite de le taire.

Et, comme je me taisais, moi, attristé et blessé au fond de l’âme, il reprit :

— Monsieur Sylvestre, je suis désolé de vous avoir fait de la peine ; mais est-ce ma faute ? Je suis un gardeur de vaches, et je ne peux pas sentir et penser comme vous, qui êtes un aristocrate et un philosophe. Tenez, vous n’êtes pas ici dans le monde qu’il vous faudrait. Jamais vous ne vous habituerez à la rudesse de nos pensées et de nos paroles, et Félicie a beau vouloir élever son esprit et ses manières pour arriver jusqu’à vous, elle vous blessera toujours par quelque endroit ; car, si elle est la petite-fille du comte del Monte, elle n’en est pas moins la fille du père Morgeron, qui battait sa femme et s’enivrait avec de l’eau-de-vie quand il était de mauvaise humeur. Et puis elle a eu ce malheur dont nous parlions, dont vous ne voulez pas qu’on vous parle, et ça lui a aigri le cœur… Vous la guérirez, je ne dis pas non ; mais ce ne sera pas sans peine, et vous aurez plus d’un gravier dans votre pain quotidien. Vous avez du savoir, du courage et un grand esprit, vous vous en servirez, c’est affaire à vous ; mais il faudra passer sur beaucoup d’ornières et de cailloux avec des gens mal élevés comme nous autres. Pardonnez-moi d’avoir réveillé un souvenir qui vous déplaît, et de vous dire que ma cousine n’aime pas la Vanina. La Vanina n’a pas eu de malheur, elle ! je