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et en riant vers le château. Quand elles eurent disparu, je regagnai la modeste demeure de monsieur et madame Volabù, un peu préoccupé de ma petite aventure.

Je trouvai mon souper prêt. J’aurais été Grandgousier en personne, qu’on ne m’eut pas traité plus largement. Je crois que toute la petite basse-cour de madame Volabù y avait passé. Je n’aurais pas eu bonne grâce à me plaindre de cette prodigalité, en voyant l’air de triomphe naïf avec lequel ces braves gens me faisaient les honneurs de chez eux. J’exigeai qu’ils se missent à table avec moi, ainsi que la vieille mère de madame Volabù, qui était encore un robuste virago, nommée madame Peirecote, et qui paraissait prendre à cœur d’être bonne gardienne de l’honneur de son gendre.

Il me fallut soutenir un rude assaut pour me préserver d’une indigestion, car mon brave vetturino semblait décidé à me faire étouffer. Dès que je pus obtenir quelques instants de répit, j’en profitai pour faire des questions sur le château et ses habitants.

— C’est bien vieux, ce château, me dit Volabù d’un air capable ; c’est laid, n’est-ce pas ? Ça ressemble à une grande masure ? Mais c’est plus joli en dedans qu’on ne croirait ; c’est très-bien tenu, bien conservé, bien arrangé, quoique en vieux meubles qui ne sont plus de mode. Il y a des calorifères, ma foi ! C’est que le vieux marquis ne se refusait rien. Il n’était pas très-généreux pour les autres, mais il aimait bien ses aises, et il passait presque toute l’année ici. L’hiver, il n’allait qu’un peu à Paris, en Italie jamais, et pourtant c’était son pays.

— Et qui possède ce château à présent ?

— Son frère, la comte de Balma, qui vient de passer marquis par le décès de l’aîné de la famille. Dame, il