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lancera dans Leporello Pourquoi non ? On le vieillira, et les grandes difficultés font les grands progrès.

— Il est donc convenu que je reviens ici demain soir ? demandai-je en faisant de l’œil le tour de la table.

— Mais oui, si personne ne vous attend ailleurs ? dît Cécilia en me tendant la main avec une bienveillance tranquille, qui n’était pas faite pour me rendre fier.

— Vous reviendrez demain matin habiter le château des Désertes ! s’écria Boccaferri. Je le veux vous êtes un acteur très-utile et très-distingué par nature. Je vous tiens, je ne vous lâche pas. Et puis, nous nous occuperons de peinture, vous verrez ! La peinture en décors est la grande école de relief, de profondeur et de la lumière que les peintres d’histoire et de paysage dédaignent, faute de la connaître, et faute aussi de la voir bien employée. J’ai mes idées aussi là-dessus, et vous verrez que vous n’aurez pas perdu voire temps à écouter le vieux Boccaferri. Et puis nos costumes et nos groupes vous inspireront des sujets ; il y a ici tout ce qu’il faut pour faire de la peinture, et des ateliers à choisir.

— Laissez-moi songer à cela cette nuit, dis-je en regardant Célio, et je vous répondrai demain matin.

— Je vous attends donc demain à déjeuner, ou plutôt je vous garde ici sur l’heure.

— Non, dis-je, je demeure chez un brave homme qui ne se coucherait pas cette nuit s’il ne tue voyait pas rentrer. Il croirait que je suis tombé dans quelque précipice, ou que les diables du château m’ont dévoré.

Ceci convenu, nous nous séparâmes. Célio m’aide à reprendre mes habits et voulut me reconduire jusqu’a mi-chemin de ma demeure ; mais il me parla à peine, et quand il me quitta, il me serra la main tristement. Je le vis s’en retourner sur la neige, avec ses bottes de cule jaune, son manteau de velours, sa grande rapière au côté