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tige de sa fantastique existence avaient, en dépit des têtes, coupées surexcité les imaginations féminines. La grande Lucinde, la petite Anna, voire la grosse Régine, ne se cachaient pas d’être follement éprises de lui. La discrète Impéria interrogée avait répondu avec le mystérieux sourire qu’elle avait en certaines occasions :

— Je mentirais si je vous disais que je ne trouve pas ce paladin admirable sur son cheval. Quand il en descend, et surtout quand il parle français, il perd un peu. Un homme comme celui-là ne devrait parler que la langue des temps fabuleux ; mais enfin ce n’est pas sa faute s’il est notre contemporain. Hier, j’étais trop fatiguée pour le regarder ; aujourd’hui, je l’ai vu, et, s’il continue à être ce qu’il a l’air d’être, c’est-à-dire un Tancrède du Tasse doublé d’un Ajax d’Homère, je dirai, comme ces dames, que c’est un idéal ; mais…

— Mais quoi ? dit Bellamare.

— Mais la beauté qui parle aux yeux, reprit-elle, n’est que le prestige d’un moment : l’œil du corps n’est pas toujours celui de l’âme.

Il me sembla qu’elle me regardait, et j’en pris du dépit : avec la santé, l’amour se réveillait en moi,