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que je n’aimais pas les beaux garçons. — Je fus touchée de son dévouement, j’appréciai son noble caractère ; mais, quand vous l’avez vu à Blois, je ne sentais absolument rien de plus pour lui que pour Léon, bien que sa société fût plus aimable et me plût davantage. Quand il nous quitta, je ne m’en aperçus pas beaucoup. Quand je le retrouvai gravement malade à Paris, je le soignai comme j’aurais soigné Léon ou Moranbois. Les pauvres se soignent mutuellement sans aucune de ces prudentes réserves que les riches peuvent conserver entre eux jusqu’au lit de mort. Nous ne pouvons guère nous faire remplacer, nous autres ; nous nous assistons personnellement, nous nous aimons peut-être davantage.

» Vous devez d’ailleurs savoir par Laurence quel genre d’amitié expansive, familière, confiante, fait naître entre camarades de théâtre la vie en commun. On se querelle beaucoup, chaque réconciliation resserre le lien fraternel ; on se blesse pour un rien, on se demande pardon à l’excès. Notre association éprouva de grandes traverses. Vous savez notre naufrage, la mort tragique de Marco, nos aventures de brigands, nos triomphes, nos revers,