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Impéria se recueillit un instant, et raconta ainsi son histoire :

— Vous savez comment et pourquoi je suis entrée au théâtre. Laurence a dû vous le dire. Je voulais faire vivre mon père, et, malgré toutes les vicissitudes de mon existence, j’ai réussi à lui donner jusqu’à son dernier jour autant de bien-être qu’il en pouvait goûter dans l’état de folie douce où il était tombé. J’allais le voir tous les ans, il ne me reconnaissait pas ; mais je m’assurais qu’il ne manquait de rien, et je revenais tranquille. C’est à M. Bellamare que je dois d’avoir pu remplir ce devoir, et c’est de M. Bellamare que je vais vous parler. Quand, pour la première fois, j’allai le trouver secrètement pour lui demander de faire de moi une artiste, il n’était pas un inconnu pour moi. Il était venu monter et diriger une comédie d’enfants et d’amis intimes que nous préparions à Valclos pour la fête de mon pauvre père. J’avais douze ans. Bellamare était encore jeune. Sa laideur comique m’égaya beaucoup d’abord ; puis son esprit, sa bonté, sa grâce tendre avec les enfants, prirent mon cœur d’enfant et s’en emparèrent pour jamais.