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raisons qui vous ont entraîné à lui écrire que vous l’adoriez, pour l’oublier ensuite et retourner à la belle Impéria.

Je lui racontai fidèlement tout ce que je vous ai raconté, sans rien omettre. J’avouai qu’il y avait eu peut-être un certain dépit dans mon premier élan vers l’inconnue, et un autre dépit dans mon silence, quand elle avait douté de moi.

— J’étais sincère, lui dis-je ; j’avais aimé Impéria, mais je me jetais dans un nouvel amour avec courage, avec loyauté, avec ardeur. Votre amie eût pu me sauver, elle ne l’a pas voulu. Je n’aurais jamais revu Impéria, je l’aurais oubliée sans retour et sans regret. Rien ne m’était plus facile dans ce moment-là. L’inconnue s’est montrée jalouse sous des formes hautaines dont la froide générosité m’a humilié profondément. J’ai eu peur d’une personne exigeante au point de me faire un crime d’avoir aimé avant de la connaître, et maîtresse d’elle-même au point de cacher son mépris sous des bienfaits. J’aurais mieux aimé une jalousie ingénue ; j’aurais trouvé des paroles émues, des serments vrais pour la rassurer. J’ai prévu des luttes terribles, une amertume invincible amassée dans son