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Nous fîmes un excellent repas champêtre chez des gens très-hospitaliers qui nous parlaient par gestes et qui furent si contents de nous, qu’ils nous firent faire un bon bout de chemin sur une espèce de char antique à roues pleines, qui criait comme un damné. Nos petits cadeaux avaient eu grand succès.

Nous arrivâmes à Raguse moins pimpants que nous n’en étions sortis. Notre premier soin fut de courir au consulat français, où j’échangeai un de mes billets et où nous racontâmes notre triste aventure. Il nous fut dit qu’il n’y avait aucun espoir de recouvrer notre fortune ; nous étions bien heureux d’avoir conservé la vie.

Il fallait que les heiduques, c’est le nom que l’on donnait à ces brigands, fussent très-nombreux en ce moment et que leurs bandes eussent peur les unes des autres, puisqu’on n’avait pas pris le temps de nous débarrasser de nos habits et même de nos chemises. Sans doute on ne nous avait pas massacrés pour ne pas attirer d’autres oiseaux de proie par le bruit d’un combat ; on s’était contenté de nous dévaliser en gros plutôt que de partager avec de nouveaux venus les menues dépouilles.