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discutons plus leurs mérites respectifs, ne souffrons plus qu’ils se disputent ; que l’un ne soit plus l’insensé, l’autre le pédant. Réservons avec Molière notre gaieté pour les faux poètes et les faux savants. Et surtout qu’on ne se serve plus des mânes illustres comme d’un argument contre le progrès !

Je résumais ainsi dans mon esprit, et dans la forme la plus vulgaire possible, afin de m’habituer à la face pratique de ces hautes vérités, ce livre dont l’incomparable expression ne peut être indiquée, — toujours l’impossible transvasement de l’individualité puissante, — lorsque Sylvain me tira de ma méditation en me disant :

— Nos bêtes ont faim, et voilà de l’ombre. Nous avions fait six lieues en un instant. L’ombre est encore rare : les chênes et les ormes n’ont que des feuilles bien jeunes, plus blondes que vertes ; mais il y avait là un jeune pin qui servit d’ombrelle à la halte au bord du chemin. Je restai un moment à regarder ces petits chevaux qui se léchaient l’un l’autre assez bêtement. Ils mangè-