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en vain sacrifié son repos et son honneur, qu’il va emporter dans la tombe une tache ineffaçable… Il embrasse Thérèse et meurt sans se rétracter. Voilà Rousseau tel que je le conçois…

— Tel que vous l’arrangez…

— Et tel que nul ne peut me prouver pourtant qu’il n’ait pas été.

— En résumé, vous le laissez blanc comme neige à l’idolâtrie de la postérité.

— Non, monsieur, je n’approuve entièrement Rousseau dans aucun de ces partis extrêmes qui le caractérisent. Je crois qu’il s’est suicidé toute sa vie pour céder au besoin que son cœur éprouvait de réparer les erreurs de son imagination ou les emportements de son caractère.

» Je crois qu’il n’a jamais su ni aimer ni haïr, parce qu’il a trop vivement subi le ressentiment et la tendresse, le soupçon et la confiance. Il a combattu la fatalité de son organisation sans pouvoir la vaincre. Je crois qu’il a manqué de force physique et de courage moral au bout de la lutte, et que l’infortuné, après avoir trop passionnément défendu