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cristal que tu as voulu conquérir, et dis-moi s’il te paraît digne de tout ce que tu as fait pour le posséder.

― Ce monde est beau à voir, répondis-je, et il me confirme dans l’idée que tout est fête, magie et richesse dans la nature, sous les pieds de l’homme comme au-dessus de sa tête. Il ne m’arrivera jamais de dire comme Walter que la forme et la couleur ne signifient rien, et que le beau est un vain mot ; mais j’ai été élevé aux champs, Laura : je sens que l’air et le soleil sont les délices de la vie, et que l’on s’atrophie le cerveau dans un écrin, si magnifique et colossal qu’il soit. Je donnerais donc toutes les merveilles que voici autour de nous pour un rayon du matin et le chant d’une fauvette, ou seulement d’une sauterelle, dans notre jardin de Fischhausen.

― Qu’il soit fait comme tu veux ! dit Laura ; mais écoute, mon cher Alexis : en quittant avec toi le monde du cristal, je sens que j’y laisse mon prestige. Tu m’y as toujours vue grande, belle, éloquente, presque fée. Dans la réalité, tu vas me