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pâle, mais sa volonté ne faiblit pas. — Lise, répondit-il, je ne vous cacherai pas que jusqu’à ce jour, quelque chose que j’aie pu tenter pour m’en distraire, j’ai été amoureux de Tonine, oui, amoureux comme un fou par moments, et dans d’autres moments amoureux avec toute ma raison, car je me rappelais sa bonté et son esprit, que je ne pouvais retrouver dans aucune autre femme. Je ne pense donc pas que le souvenir de sa figure fût la plus grande cause de mes regrets, et je ne peux pas vous dire le chagrin que pourra me causer le changement de cette figure qui me plaisait tant ; je ne le sais pas moi-même. Si Tonine est infirme, peut-être aussi que son caractère va être changé ; mais tout cela, voyez-vous, ne me fera pas reculer. J’étais revenu pour lui offrir le petit bien que je croyais avoir. Je ne l’ai plus, il me reste la force et l’envie de travailler, et quand je devrais mourir à la peine, je veux que Tonine ne souffre de rien et me doive tout. Voilà mon idée, Lise, et je n’en changerai pas. Vous pouvez donc tout me dire.

— Eh bien ! tranquillisez-vous, reprit Lise en lui