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la ville noire.

— Tu as raison, répondit Sept-Épées, et ton bon courage me remonte les esprits ! Oui, elle est belle, notre ville basse, notre ville noire, comme on l’appelle dans le pays. Je me souviens de mon étonnement quand j’arrivai ici pour faire mon apprentissage. Je n’avais que douze ans, et j’avais toujours vécu dans la campagne, à vingt-cinq lieues d’ici. J’avais perdu père et mère il n’y avait pas longtemps, et j’avais encore le cœur gros ! Il ne me restait personne au monde que mon brave parrain, lequel voulut bien se souvenir de moi, quoiqu’il eût quitté le pays depuis longtemps, et me faire réclamer en disant qu’il voulait m’enseigner un bon état qui était le sien. J’étais bien misérable, mes parents n’ayant rien laissé ; mais on aime toujours son endroit, et je me souvenais si peu de mon parrain que je me trouvais malheureux de lui obéir. Si le maire et le curé de mon village ne m’eussent parlé sévèrement, je serais resté. Aussi je ne fis que pleurer tout le long du chemin, et quand j’entrai dans la Ville Noire, ce fut bien autre chose ! la peur me prit. J’avais monté au hasard dans la ville haute,