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la ville noire.

fini ! Cette fantaisie-là m’a quittée et reprise deux ou trois fois depuis un an, mais chaque fois je me suis fait une raison, car je voyais bien que je serais malheureuse avec ce jeune homme ; oui, malheureuse du plus grand malheur qu’il y ait peut-être pour une femme, celui de ne pouvoir pas rendre heureux et content celui qu’elle aime. Si je pleure dans ce moment-ci, c’est parce que vous m’y poussez en me disant que j’ai des peines, et vous avez tort. Rien ne rend lâche comme de se laisser plaindre. Est-ce que vous ne voyez pas tout ce que je surmonte quand je m’occupe des autres afin de m’oublier ? J’ai trouvé cette consolation-là, qui est grande, si grande qu’elle me donne du bonheur malgré tout.

— Peut-être bien, dit la Lise, que Sept-Épées a la même peine que toi, et qu’en vous expliquant encore une fois vous pourriez vous entendre.

— Non ! reprit Tonine, nous ne nous entendrions pas mieux, car nous ne voyons pas de la même manière. S’il est vrai qu’il ait du dépit, il cherche dans l’argent un remède qui me répugne, tandis que le