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la ville noire.

Sept-Épées se disait alors qu’il fallait devenir riche afin de la mettre à même d’être généreuse à son gré, et quand la jalousie lui avait fait un peu négliger ses affaires, il s’y replongeait courageusement, mais sans grand succès. Ses relations au dehors étaient encore mal établies, ses placements médiocres, ses livraisons souvent en retard par la faute de ses ouvriers, en dépit de l’activité et de l’autorité de Va-sans-Peur.

Sept-Épées, dans son inquiétude, s’imaginait que Tonine eût pu lui donner l’élan du génie, si elle eût voulu l’aimer ; mais il n’était ni hardi, ni habile avec elle. Sa fierté s’accommodait peu des patientes délicatesses avec lesquelles il faut convaincre une femme que l’on a rendue méfiante par sa propre faute. Généreux et sincère, il ne savait pas être tendre. Sûr de sa franchise et orgueilleux de sa bonne conduite, qui l’élevait au-dessus de la plupart de ses jeunes compagnons, il ne souffrait pas aisément qu’on ne lui rendît pas justice. Il avait vu les paresseux et les débauchés faciles au repentir, aux larmes, aux protestations. Son parrain avait eu sur