Page:Sand - La Petite Fadette, Calmann-Lévy.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
la petite fadette

son chagrin à ses parents, et craignant d’augmenter celui qu’ils pouvaient avoir.

Si quelqu’un eût dû être jaloux, Landry y aurait eu pourtant plus de droits que Sylvinet. Sylvinet était le mieux aimé de la mère, et mêmement le père Barbeau, quoiqu’il eût une préférence secrète pour Landry, montrait à Sylvinet plus de complaisance et de ménagement. Ce pauvre enfant, étant le moins fort et le moins raisonnable, était aussi le plus gâté, et l’on craignait davantage de le chagriner. Il avait le meilleur sort, puisqu’il était dans la famille et que son besson avait pris pour lui l’absence et la peine.

Pour la première fois le bon Landry se fit tout ce raisonnement, et trouva son besson tout à fait injuste envers lui. Jusque-là son bon cœur l’avait empêché de lui donner tort, et, plutôt que de l’accuser, il s’était condamné en lui-même d’avoir trop de santé, et trop d’ardeur au travail et au plaisir, et de ne pas savoir dire d’aussi douces paroles, ni s’aviser d’autant d’attentions fines que son frère. Mais, pour cette fois, il ne put trouver en lui-même aucun péché contre l’amitié : car, pour venir