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la petite fadette

— Cela, père Barbeau, je ne serais pas obligée de vous le dire ; mais je le ferai pour vous contenter. Je lui répondais que nous avions encore le temps de songer au mariage, et que je ne me déciderais pas volontiers pour un garçon qui me ferait la cour contre le gré de ses parents.

Et comme la petite Fadette disait cela d’un ton assez fier et dégagé, le père Barbeau en fut inquiet.

— Je n’ai pas le droit de vous interroger, Fanchon Fadet, dit-il, et je ne sais point si vous avez l’intention de rendre mon fils heureux ou malheureux pour toute sa vie ; mais je sais qu’il vous aime terriblement, et si j’étais en votre lieu, avec l’idée que vous avez d’être aimée pour vous-même, je me dirais : Landry Barbeau m’a aimée quand je portais des guenilles, quand tout le monde me repoussait, et quand ses parents eux-mêmes avaient le tort de lui en faire un grand péché. Il m’a trouvée belle quand tout le monde me déniait l’espérance de le devenir ; il m’a aimée en dépit des peines que cet amour-là lui suscitait ; il m’a aimée absente comme présente ; enfin, il m’a si bien