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la petite fadette

et pendant ce temps, comme la mère ne pouvait pas laisser pâtir ses petits, elle leur donna le sein à l’un comme à l’autre.

Les gens de chez nous ne se décident pas vite, et, quelque riche qu’on soit, il faut toujours un peu marchander. On savait que les Barbeau avaient de quoi payer, et on pensait que la mère, qui n’était plus de la première jeunesse, ne pourrait point garder deux nourrissons sans s’épuiser. Toutes les nourrices que le père Barbeau put trouver lui demandèrent donc dix-huit livres par mois, ni plus ni moins qu’à un bourgeois.

Le père Barbeau n’aurait voulu donner que douze ou quinze livres, estimant que c’était beaucoup pour un paysan. Il courut de tous les côtés et disputa un peu sans rien conclure. L’affaire ne pressait pas beaucoup ; car deux enfants si petits ne pouvaient pas fatiguer la mère, et ils étaient si bien portants, si tranquilles, si peu braillards l’un et l’autre, qu’ils ne faisaient presque pas plus d’embarras qu’un seul dans la maison. Quand l’un dormait, l’autre dormait aussi. Le père avait arrangé le berceau, et quand ils pleuraient tous deux à la