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le père Barbeau le conjurait, en pleurant, de mieux reconnaître son amitié. C’était encore pire : Sylvinet pleurait, se repentait, demandait pardon à son père, à sa mère, à son besson, à toute sa famille ; et la fièvre revenait plus forte, après qu’il avait donné cours à la trop grande tendresse de son cœur malade.

On consulta les médecins à nouveau. Ils ne conseillèrent pas grand’chose. On vit, à leur mine, qu’ils jugeaient que tout le mal venait de cette bessonnerie, qui devait tuer l’un ou l’autre, le plus faible des deux conséquemment. On consulta aussi la Baigneuse de Clavières, la femme la plus savante du canton après la Sagette, qui était morte, et la mère Fadet, qui commençait à tomber en enfance. Cette femme habile répondit à la mère Barbeau :

— Il n’y aurait qu’une chose pour sauver votre enfant, c’est qu’il aimât les femmes.

— Et justement il ne les peut souffrir, dit la mère Barbeau : jamais on n’a vu un garçon si fier et si sage, et, depuis le moment où son besson s’est mis l’amour en tête, il n’a fait que dire du mal de toutes les filles que nous con-