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la petite fadette

mère me l’a raconté, s’en allait aux quatre chemins avec une grosse trique, pour appeler le diable, et lui donner, disait-il, une bonne vannée. Et on l’entendait crier dans la nuit : « Viendras-tu, figure de loup ? Viendras-tu, chien enragé ? Viendras-tu, Georgeon du diable ? » Et jamais Georgeon ne vint. Si bien que ce meunier en était devenu quasi fou de vanité, disant que le diable avait peur de lui.

— Mais, disait Landry, ce que tu crois là, que le diable n’existe point, n’est pas déjà trop chrétien, ma petite Fanchon.

— Je ne peux pas disputer là-dessus, répondit-elle ; mais s’il existe, je suis bien assurée qu’il n’a aucun pouvoir pour venir sur la terre nous abuser et nous demander notre âme pour la retirer du bon Dieu. Il n’aurait pas tant d’insolence, et, puisque la terre est au bon Dieu, il n’y a que le bon Dieu qui puisse gouverner les choses et les hommes qui s’y trouvent.

Et Landry, revenu de sa folle peur, ne pouvait pas s’empêcher d’admirer combien, dans toutes ses idées et dans toutes ses prières, la petite Fadette était bonne chrétienne. Même-