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la petite fadette

à me consoler, car je n’en ai pas de chagrin.

— Dame ! qu’est-ce qui sait comment tu serais si tu étais habillée et coiffée comme les autres ? Il y a une chose que tout le monde dit : c’est que si tu n’avais pas le nez si court, la bouche si grande et la peau si noire, tu ne serais point mal ; car on dit aussi que, dans tout le pays d’ici, il n’y a pas une paire d’yeux comme les tiens, et si tu n’avais point le regard si hardi et si moqueur, on aimerait à être bien vu de ces yeux-là.

Landry parlait de la sorte sans trop se rendre compte de ce qu’il disait. Il se trouvait en train de se rappeler les défauts et les qualités de la petite Fadette ; et, pour la première fois, il y donnait une attention et un intérêt dont il ne se serait pas cru capable un moment plus tôt. Elle y prit garde, mais n’en fit rien paraître, ayant trop d’esprit pour prendre la chose au sérieux.

— Mes yeux voient en bien ce qui est bon, dit-elle, et en pitié ce qui ne l’est pas. Aussi je me console bien de déplaire à qui ne me plaît point, et je ne conçois guère pourquoi