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d’hésitation, et enfin répétant mot à mot ce que lui dictait la petite Marie, lorsqu’il arriva à cet endroit de son oraison où, le sommeil le gagnant chaque soir, il n’avait jamais pu l’apprendre jusqu’au bout. Cette fois encore, le travail de l’attention et la monotonie de son propre accent produisirent leur effet accoutumé, il ne prononça plus qu’avec effort les dernières syllabes, et encore après se les être fait répéter trois fois ; sa tête s’appesantit et se pencha sur la poitrine de Marie : ses mains se détendirent, se séparèrent et retombèrent ouvertes sur ses genoux. À la lueur du feu du bivouac, Germain regarda son petit ange assoupi sur le cœur de la jeune fille qui, le soutenant dans ses bras et réchauffant ses cheveux blonds de sa pure haleine, s’était laissée aller aussi à une rêverie pieuse et priait mentalement pour l’âme de Catherine.

Germain fut attendri, chercha ce qu’il pourrait dire à la petite Marie pour lui exprimer ce qu’elle lui inspirait d’estime et de reconnaissance, mais ne trouva rien qui pût rendre sa pensée. Il s’approcha d’elle pour embrasser son fils qu’elle tenait toujours pressé contre son sein, et il eut peine à détacher ses lèvres du front du petit Pierre.

— Vous l’embrassez trop fort, lui dit Marie en repoussant doucement la tête du laboureur, vous allez le réveiller. Laissez-moi le recoucher puisque le voilà reparti pour les rêves du paradis.