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la main ! Dans le bois, quand mon fils dormait et que tu dormais aussi, j’ai failli t’embrasser tout doucement. Mais je serais mort de honte plutôt que de te le demander, et j’ai autant souffert dans cette nuit-là qu’un homme qui brûlerait à petit feu. Depuis ce temps-là j’ai rêvé à toi toutes les nuits. Ah ! comme je t’embrassais, Marie ! Mais toi, pendant ce temps-là, tu dormais sans rêver. Et, à présent, sais-tu ce que je pense ? c’est que si tu te retournais pour me regarder avec les yeux que j’ai pour toi, et si tu approchais ton visage du mien, je crois que j’en tomberais mort de joie. Et toi, tu penses que si pareille chose t’arrivait, tu en mourrais de colère et de honte !

Germain parlait comme dans un rêve sans entendre ce qu’il disait. La petite Marie tremblait toujours ; mais comme il tremblait encore davantage, il ne s’en apercevait plus. Tout à coup elle se retourna ; elle était tout en larmes et le regardait d’un air de reproche.

Le pauvre laboureur crut que c’était le dernier coup et, sans attendre son arrêt, il se leva pour partir ; mais la jeune fille l’arrêta en l’entourant de ses deux bras et, cachant sa tête dans son sein :

— Ah ! Germain, lui dit-elle en sanglotant, vous n’avez donc pas deviné que je vous aime ?

Germain serait devenu fou si son fils, qui le cherchait et qui entra dans la chaumière au grand galop