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LA FAMILLE DE GERMANDRE.

une idée que j’ai beaucoup caressée dans ma jeunesse ; avant d’avoir réussi à me construire une nacelle, je n’avais jamais (ni moi ni personne) exploré certains recoins de ces eaux dormantes, et, la première fois que je pus aller partout, ce fut avec une peur superstitieuse, comme si j’allais profaner le palais des ondines. Mais vous avez raison : ce qu’on voit ne vaut pas toujours ce qu’on rêve, et nous ferons bien de revenir pour ne pas découvrir un champ de sarrasin au bout de ma forêt enchantée.

Il fit tourner la barque, qui, entraînée par un courant insensible, descendit mollement et lentement vers l’écluse. Ils avaient déposé leurs perches et s’étaient assis vis-à-vis l’un de l’autre, chacun s’attendant à une explication qu’aucun d’eux ne se sentait disposé à provoquer. Octave voyait bien que sa visite inattendue était une sorte d’extravagance s’il n’y donnait un prétexte ; mais il eût fallu savoir comment mademoiselle de Germandre l’avait présentée à son frère. De son côté, le chevalier croyais en savoir assez pour ne devoir paraître s’étonner de