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On voit qu’à l’exception de l’abbé, le marquis de Germandre avait survécu à tous ses frères, et, de ceux-ci, l’abbé seul était vivant ; car, au 1er juillet 1808, on procédait aux funérailles du marquis décédé quinze jours auparavant, dans sa quatre-vingt et unième année. C’était un personnage mystérieux et bizarre que ce marquis. Il n’avait jamais été avare ; mais il avait toujours passé pour égoïste, ne se refusant rien, ne faisant pour les autres que le strict nécessaire, et professant pour règle de conduite que chacun doit se trouver content quand ses ressources sont en rapport avec sa capacité. On devine aisément que sous cette rigide maxime se cachait ou plutôt se révélait l’orgueil d’une intelligence satisfaite d’elle-même. Le marquis n’était pourtant pas un homme de génie. Il était savant, mais savant sans spécialité, à moins qu’on ne veuille appeler ainsi une grande habileté pour certains ouvrages sans utilité aucune, dont nous aurons assez souvent lieu de parler plus tard, et qui avaient absorbé jusqu’à la passion, jusqu’à la monomanie, les dix dernières années de son existence. Chose étrange,