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traire ou de vous secourir. C’est donc dans notre intérêt que je vous demande de rester ici ; car, en quelque lieu que vous soyez, vous nous serez désormais un objet de sollicitude ou un sujet d’inquiétude. Choisissez généreusement.

J’étais fort embarrassé. L’offre était si gracieusement tournée, que je me trouvais maussade d’y résister. Lord B***, plus pénétrant que sa femme, devina mes scrupules et vint à mon secours.

— Elle vous a rappelé qu’elle était riche et que vous ne l’étiez pas, me dit-il de manière à être entendu de lady Harriet. C’est une maladresse ; mais l’intention était bonne, et, quant à vous, vous sortirez d’affaire à votre honneur en payant votre chambre ce qu’elle nous coûte ; ça n’ira pas à deux écus par mois. Vous nous permettrez bien de vous prêter les autres salles dont nous ne nous servons pas, pour faire de la peinture et pour fumer votre cigare les jours de pluie. Consentez à cet arrangement, ajouta-t-il tout bas. Sinon, je serai accusé de froideur, d’impolitesse, de maladresse et d’ingratitude envers vous.

Voilà donc mon gîte réglé. Restait à régler celui de Brumières. Je mourais de peur qu’il n’acceptât l’offre qui lui fut faite de partager l’hospitalité que l’on m’imposait. Avec ses prétentions sur le cœur et sur la main de miss Medora, je craignais d’avoir à endosser quelque responsabilité ridicule ou fâcheuse. Heureusement, l’offre lui fut faite avec moins de chaleur qu’à moi, et il eut le bon goût de refuser. Mais il est invité à revenir dîner souvent, ce qui indique l’intention de l’admettre à l’intimité des mœurs françaises. Ce n’est pas la première fois que je remarque combien les Anglais, quand ils sont aimables, le sont complètement. Sont-ils ainsi chez eux ? Je ne sais.

Nous prîmes congé des dames, qui étaient fatiguées, et lord B*** me reconduisit à ma chambre pour me montrer