Page:Sand - La Daniella 1.djvu/346

Cette page n’a pas encore été corrigée

pétit. Je ne saurais donc affirmer que, malgré mon chagrin, mes agitations et mes dangers, la vue et l’odeur de ce macaroni brûlant me fussent précisément désagréables.

— Mangez, disait Tartaglia, et ne craignez rien. La Daniella ne mourra pas pour une entorse. Quand je l’ai laissée, elle ne souffrait déjà plus que du chagrin d’être séparée de vous. La première chose qu’elle me demandera quand je la verrai, ce soir, c’est si vous avez consenti à dîner, à ne pas vous désoler et à prendre en patience son mal et votre ennui.

— Ah ! mon ennui, qu’importe ? Mais son mal ! Et ce frère qui la menace ! Est-ce vrai, tout ce que tu m’as dit ?

— C’est vrai, Excellence, vrai comme voilà un bon macaroni ; mais les menaces de l’ivrogne Masolino, la Daniella y est habituée et s’en moque. Il a beau se douter de quelque chose, il ne sait rien, il ne peut rien savoir. Et, d’ailleurs, s’il voulait maltraiter la pauvrette, les gens de la villa Taverna ne le souffriraient pas. Il a beau rôder dans le parc, s’il ne vous rencontre pas, il ne peut rien prouver contre elle.

— Prouver ! elle serait donc impliquée dans mes contrariantes affaires, si l’on supposait qu’elle a des rapports d’amitié avec moi ?

— Eh ! mais oui, Excellence. Vous faites partie d’une société secrète…

— Cela est faux.

— Je le sais bien ! mais on le croit ; et Daniella, si son frère la dénonçait, comme votre complice, au provincial des dominicains, ou seulement un curé de sa paroisse, comme mauvaise chrétienne, amoureuse d’un hérétique et d’un iconoclaste, pourrait bien aussi tâter de la prison.

— Ah ! ciel ! je serai prudent, je me soumets ! mais ne me trompes-tu pas ?

— Eh pourquoi vous tromperais-je, vous que je voudrais