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— M’ennuyer ! tu ne viendras donc plus me voir ?

— Et comment vivrais-je si je ne venais pas ? Oh ! si tu voyais un jour s’écouler sans moi, tu pourrais bien dire : La Daniella est morte !

— Mais la Daniella ne peut pas mourir !

— Non, puisque tu l’aimes !… Donc, tu te soumets ?

— Avec une joie dont tu n’as pas d’idée ; car je me suis tourmenté tout un jour du désir d’être enfermé ici avec toi. Une seule chose me gâte mon rêve, c’est le métier que tu fais pour venir et t’en aller. Cela est un vrai supplice pour moi.

— Et tu as tort. Voilà le beau temps ; le vent souffle de l’Apennin, tous les nuages s’en vont à la mer. Nous avons du soleil au moins pour huit jours ; mes promenades seront donc très-jolies, et, puisque nous avons inventé, Olivia et moi, l’arrivée prochaine d’ouvriers dans ce château, nous aurons mille prétextes pour qu’elle m’y envoie avec des paquets. D’ailleurs, le plus lourd est transporté ; je n’ai plus qu’à m’occuper de te nourrir. Si ce beau temps nous amène quelques étrangers à Frascati, les soirées sont encore trop fraîches pour qu’ils ne retournent pas à Rome avant la nuit. Or, comme la journée suffit à peine pour leur faire voir les villas qui touchent à la ville, et Tusculum, qui attire plus que tout le reste, tu ne seras pas dérangé ici. Mondragone est toujours ce que l’on visite le moins, et, s’il arrivait que, pour ne pas éveiller les soupçons, Olivia fût forcée d’amener ici quelque promeneur, souviens-toi de ce que je vais te dire de sa part. Elle aurait le soin de frapper très-longtemps et très-fort à la grande porte avant d’ouvrir elle-même. Elle ferait semblant de compter sur un ouvrier occupé dans la cour, et, ne le voyant pas venir, elle essayerait une prétendue autre clef, qui serait la véritable et qui ouvrirait comme par hasard. Tu aurais eu tout le temps de rentrer dans ton