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Quand le ménage fut fini, je lui demandai si le fermier dont elle m’avait parlé, et à qui nous venions de dérober deux bottes de paille pour me faire un lit, ne venait jamais dans le palais. J’appris qu’il demeurait dans les constructions semi-rustiques que j’apercevais au bout de la grande allée de cyprès. C’est l’usage, dans les anciennes propriétés italiennes, de planter une vraie ferme et de vrais bestiaux tout au beau milieu des jardins. C’est la véritable villeggiatura, et c’est très-bien vu. Les bœufs avec leurs chars passant dans les allées, les chevaux et les vaches broutant les tapis verts des pelouses, ne gâtent rien dans ces paysages arrangés, qui ont leur place dans l’ensemble, comme la rocaille dans les parterres et la girande sur les terrasses. Ces fermes choisies n’affectent pas des airs suisses comme la laiterie de Trianon. Ce sont de jolies fabriques d’un goût bien local, où l’on a incrusté tous les débris de marbres antiques que l’on a eus de reste après avoir bâti les palais. Ces marbres blancs, irrégulièrement encadrés dans la brique rosé, sont d’un très-joli effet.

Le fermier de la laiterie ou ferme-jardinière de Mondragone est un beau paysan que j’ai rencontré quelquefois dans le stradone, et qui a toute la confiance des gens d’affaires de la propriété. Mais il ne vit pas en très-bonne intelligence avec Olivia, qui voulait avoir le monopole des bonnes mains des promeneurs et des touristes. Elle a réclamé ; il y a eu de graves contestations, et le jugement souverain de l’intendant a partagé les intérêts en tranchant ainsi la question :

— Tout ce qui est en dehors du palais, annexes, terrasses extérieures, jardins et bâtiments d’exploitation, est placé sous la gouverne et responsabilité du fermier Felipone ; tout ce qui est château, cours ceintes de murs, pavillons, galeries et corps de logis attenant au palais, est du ressort d’Olivia. Chacune des parties a son