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— Des conditions !… M’avez-vous promis seulement deux jours d’attachement ? Et pourtant, je suis là !

— Tu es là tout en larmes… C’est comme si tu n’y étais pas ; car je te jure que je ne veux rien devoir à une résolution que tu regrettes. Si je te déplais, ou si tu te repens de ta confiance, va-t’en donc !

— Non, je suis venue et je reste ; car je vous aime, moi ! C’est la seule chose dont je sois sûre. Et, là-dessus, elle cacha sa figure dans ses mains, et pleura avec tant d’effusion, que mes premiers transports firent place à de secrètes angoisses.

— Voyons, Daniella, repris-je, si vous êtes une fille sérieuse et passionnée, quittons-nous ; car je suis un homme d’honneur, et je ne peux ni rester dans votre pays ni vous emmener dans le mien ; et, si vous êtes encore pure, comme vous avez voulu me le faire entendre, sortez, sortez ! Je ne veux pas vous séduire et me créer un devoir au-dessus de mes forces. Je suis pauvre et ne peux vivre honorablement que dans une situation indépendante, je vous l’ai dit. Adieu donc. Allons, partez, pendant que j’ai encore le courage de le vouloir.

— Vous vous feriez donc un grand crime de séduire une fille dont vous seriez le premier amant !

— Oui, si elle avait, comme vos larmes me le font croire, la conscience de son sacrifice. Or, je ne veux pas accepter ce sacrifice, n’en pouvant offrir aucun en échange.

— Vous dites cela bien sérieusement ?

— Je vous le dis sur mon honneur.

— Rien en échange ! répéta-t-elle en se dirigeant vers la porte. Pas un jour, pas une heure de fidélité, peut-être !

Elle ouvrit la porte et sortit lentement, comme pour me donner le temps de la rappeler ; mais j’eus la force de n’en rien faire, car je m’étais senti, et je me sentais encore si