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physique, me paraît plus difficile que le rêve de la transplanter ailleurs.

Disons donc, pour en revenir à l’aspect des choses ici qu’elles sont mal situées relativement au cadre qui les environne : un cadre de constructions laides, pauvres, bêtes ou choquantes ; et, par malheur, rien qui puisse être dégagé pour l’œil, de ces accessoires déplorables, à moins de grands partis pris, de grandes dépenses, de grands moyens et de grandes idées par conséquent. Sans aller aussi loin que moi tout à l’heure (il ne m’en coûtait rien !), le formidable travail de démolition et de reconstruction auquel se livre aujourd’hui l’édilité parisienne serait ici aux prises avec des éléments grandioses, des rêves magnifiques, sans compter les besoins impérieux d’assainissement que réclame au plus vite une population décimée par la fièvre, même au sein des quartiers réputés les mieux aérés et les mieux entretenus.

Si vous saviez en quoi consiste le nettoyage d’une ville qui possède à chaque coin de rue ce que l’on appelle un immondiziario, c’est-à-dire une borne, souvent décorée d’un fragment antique très-curieux, d’un torse innommé ou d’un pied colossal, sur lequel s’entassent toutes les ordures imaginables ! Cela sert à enterrer des chiens morts sous des trognons de choux et beaucoup d’autres choses que je ne vous dirai pas. Comme les rues sont étroites et les dépôts considérables, il faut y marcher à mi-jambe ou rebrousser chemin. Ajoutez à cela l’aimable abandon du peuple romain, qui, en quelque lieu qu’il se trouve, sur les marches des palais ou des églises, sous le balai même des custodes irrités, sous les yeux des femmes et des prêtres, s’accroupit, grave, cynique, le cigare à la bouche, ou chantant à pleine voix. Je me demande comment les poëtes contemplatifs dont je vous parlais l’autre jour ont tant pleuré sur les ruines et se