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pierre brute sur le flanc noir desquels l’hiver n’avait pu mettre sa teinte blanche et uniforme.

— On me l’avait bien dit, pensa Cristiano, que les dures nuits du Nord avaient, pour les yeux et pour l’imagination, des splendeurs inouïes. Si je m’en retournais à Naples dire que les nuits de Naples ne parlent qu’aux sens, et que qui n’a pas va l’hiver sur son trône de frimas ne se fait pas la moindre idée des merveilles de l’œuvre divine, je pourrais bien être honni ou lapidé. Qu’importe ? Vraiment tout est beau sous le ciel, et, pour quiconque sent cette beauté, peut-être que la dernière impression semble toujours la plus complète et la plus digne d’enthousiasme. Oui, il faut que ceci soit sublime, puisque me voilà oubliant le froid, que je croyais ne pouvoir jamais supporter, et même trouvant une sorte de plaisir à respirer cet air qui vous entre dans la poitrine comme une lame de poignard. Certes, j’irai jusqu’en Laponie, dût Puffo m’abandonner et le pauvre Jean crever sur la neige. Je veux aller voir la nuit de vingt-quatre heures et la petite lueur de midi au mois de janvier. Je n’aurai pas de succès dans ce pays-là ; mais la petite somme que je gagnerai ici me permettra de voyager en grand seigneur, c’est-à-dire seul et à pied, sans rien faire que voir et sentir la fine fleur de la vie, le nouveau, c’est-à-dire le jour