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effet : elle s’éteignait visiblement. Quelques instants avant de mourir, elle parut retrouver des forces et s’éveiller d’un long rêve. Elle me pria de la soulever dans mes bras et me dit à l’oreille, d’une voix éteinte :

» — Je te bénis, Cristiano : tu es mon sauveur ; je crois que j’ai été folle, je t’ai tourmenté ; Silvio me l’a reproché tout à l’heure. Je viens de le voir là, et il m’a dit de me lever, de marcher et de le suivre. Aide-moi à sortir de ce tombeau où j’avais la manie de m’enfermer… Viens !… le navire met à la voile… partons !…

» Elle fit un suprême effort pour se soulever, et retomba morte dans mes bras.

» Je ne sais trop ce qui se passa pendant plusieurs jours ; il me parut que je n’avais plus rien à faire dans la vie, puisque je n’avais plus que moi-même à garder.

» Je réunis dans la même tombe les restes de mes parents bien-aimés, j’y fis poser la plus simple et la plus blanche de toutes les pierres tumulaires amoncelées dans notre habitation ; j’y gravai moi-même leurs noms chéris sans autre épitaphe. Vous pensez bien, hélas ! que j’avais pris en horreur toutes les formules et tous les emblèmes. Quand je rentrai dans la maison, on vint me dire qu’elle n’était pas à moi, mais aux créanciers. Je le savais ; j’étais si bien pré-