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terre est sûre de conserver longtemps sa forme, et toute plante de mûrir dans le sol où elle a pris naissance. On y respire en quelque sorte avec l’air la douceur des instincts, et l’éternel bien-être de la nature s’insinue dans l’âme sans la confondre et sans l’ébranler.

— Vous avez la corde poétique, c’est fort bien vu, dit M. Goefle ; mais les habitants de ces beaux climats ne sont-ils pas malpropres, paresseux et volontairement misérables ?

— Dans toute misère, il y a moitié de la faute des gouvernants et moitié de celle des gouvernés ; le mal n’est jamais d’un seul côté. C’est ce qui fait, je crois, que le bien ne se fait pas ; mais, dans ces beaux climats, la misère engendrée par la paresse trouve son excuse dans la volupté de la vie contemplative. J’ai vivement senti, dès mon adolescence, le charme enivrant de cette nature méridionale, et je l’appréciais d’autant plus que je sentais aussi en moi des accès d’activité fiévreuse, comme si, en effet, je fusse né à cinq cents lieues de là, dans les pays froids, où l’esprit commande davantage à la matière.

— Donc, vous n’étiez pas précisément paresseux ?

— Je crois que je ne l’étais pas du tout ; car mes parents me voulaient savant, et, par affection pour