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dans le sable tiède, ou je rêvais, balancé par le pas régulier de Nino, sur les genoux de mon aimable mère.

» Peu à peu, je vis et compris la splendeur des jours et des nuits dans cette douce contrée. Ce lac est immense, non qu’il soit aussi étendu que le moindre des vôtres, mais parce que la grandeur n’est pas la dimension. La coupe de ses lignes est si vaste et son atmosphère si moelleuse à l’œil, que ses profondeurs lumineuses donnent l’idée de l’infini. Je ne puis me rappeler sans émotion certains levers et certains couchers de soleil sur ce miroir uni où se reflétaient des pointes de terre chargées de gros arbres arrondis et puissants, et les îlots lointains, blancs comme l’albâtre au sein des ondes rosées. Et la nuit, quelles myriades d’étoiles tremblotaient, sans confusion et sans secousses, dans ces eaux tranquilles ! quelles vapeurs suaves rampaient sur les collines argentées, et quelles mystérieuses harmonies couraient discrètement le long de la rive avec le faible remous de cette grande masse d’eau qui semblait craindre de troubler le sommeil des fleurs ! Chez vous, convenez-en, monsieur Goefle, la nature est violente, même dans son repos d’hiver. Tout dans vos montagnes porte la trace des cataclysmes perpétuels du printemps et de l’automne. Là-bas, toute