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selle Hélène est une personne supérieure, dont la sagesse et la compréhension m’étonnent toujours. Eh bien, il me semble parfois qu’elle éprouve les mêmes ennuis, les mêmes agitations qu’une personne ordinaire ; et, dès lors, si elle doit aimer quelqu’un, il est si naturel que Marcus, son parent, son compagnon d’enfance, celui que, tout en la laissant libre de choisir, sa grand’mère lui a toujours destiné…

MAXWELL, un peu brusque.

Vous êtes tous trop habitués à Marcus, vous ne le connaissez plus ; je l’observe, moi ! Il est froid et frivole.

CÉSAIRE.

Permettez ! frivole, non ; ce n’est là que la surface… Froid… il n’est peut-être que gauche. Il ne comprend pas d’emblée les choses difficiles. Il craint un peu la peine, il n’a jamais connu ça, lui ! Ce n’est pas un cerveau prime-sautier comme celui d’Hélène, qui, par vaillance naturelle, franchirait des abîmes… Elle rêve peut-être un paladin de l’Arioste. Vous me l’avez un peu gâtée, un peu exaltée, vous !

MAXWELL.

Moi ?

CÉSAIRE.

Dame ! vous aimez les choses sublimes et vous en parlez avec un sentiment qui fait qu’on est sous le charme ; mais les tempéraments héroïques, monsieur, sont bien rares depuis les temps fabuleux, et mademoiselle Jeanne est d’avis qu’Hélène devrait rabattre un peu de son idéal.

MAXWELL.

Et c’est parce que Jeanne le croit, que vous le croyez aussi.

CÉSAIRE, ingénument.

Dame !…

MAXWELL.

Croyez-en plutôt, mon cher Césaire, l’expérience d’un homme qui a plus vécu à lui seul, que les hôtes de cette mai-