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leur, comme une lionne blessée qui voit saigner sa plaie et la lèche en rugissant.

Tout-à-coup une main se posa sur son bras nu, une main chaude et humide comme l’haleine de cette nuit d’orage. Elle tressaillit ; et honteuse, irritée d’être surprise dans cet instant de faiblesse où nul ne l’avait jamais vue, elle bondit par une soudaine réaction de courage, et se dressa de toute sa hauteur devant le téméraire. C’était le domino bleu du bal, la courtisane Zinzolina.

Lélia jeta un grand cri ; puis, cherchant dans sa voix le ton le plus sévère, elle dit :

— Je vous ai reconnue, vous êtes ma sœur…

— Et si j’ôte mon masque, Lélia, répondit la courtisane, vous aussi, ne crierez-vous pas : — Honte et infamie sur toi ?

— Ah ! je reconnais aussi votre voix, reprit Lélia ! Vous êtes Pulchérie…

— Je suis votre sœur, dit la courtisane en se démasquant, la fille de votre père et de