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brûlant sous nos pieds. Nous appelons le soleil méridional sur nos épaules glacées, et les peuples du midi recevraient à genoux les gouttes de notre pluie sur leurs poitrines ardentes. Ainsi, partout l’homme souffre et murmure ; créature délicate et nerveuse, il s’est fait en vain le roi de la création, il en est la plus infortunée victime, il est le seul animal chez qui la puissance intellectuelle soit dans un rapport aussi disproportionné avec la puissance physique. Chez les êtres qu’il appelle animaux grossiers la force matérielle domine, l’instinct n’est que le ressort conservateur de l’existence animale. Chez l’homme, l’instinct développé outre mesure brûle et torture une frêle et chétive organisation. Il a l’impuissance du mollusque, avec les appétits du tigre ; la misère et la nécessité l’emprisonnent dans une écaille de tortue ; l’ambition, l’inquiétude déploient leurs ailes d’aigle dans son cerveau. Il voudrait avoir les facultés réunies de toutes les