Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/245

Cette page a été validée par deux contributeurs.

animé ? Voyez que de vigueur dans cette végétation libre et vagabonde, que de mouvement dans ces forêts que le vent courbe et fait ondoyer, dans ces grandes troupes d’aigles qui planent sans cesse autour des cimes brumeuses, et qui passent, en cercles mouvans, comme de grands anneaux noirs sur la nappe blanche et moirée du glacier ? Entendez-vous le bruit qui monte et descend de toutes parts ? Les torrens qui pleurent et sanglottent comme des ames malheureuses, les cerfs qui brament d’une voix plaintive et passionnée, la brise qui chante et rit dans les bruyères, les vautours qui crient comme des femmes effrayées ; et ces autres bruits étranges, mystérieux, indécrits, qui grondent sourdement dans les montagnes, ces glaces colossales qui craquent dans le cœur des blocs, ces neiges qui s’éboulent et entraînent le sable, ces grandes racines d’arbres qui luttent incessamment avec les entrailles de la terre et qui travaillent à soule-