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au temps où nous sommes ? Cette insouciance-là s’appelle du courage quand elle produit un bien quelconque ; mais quand elle se borne à exposer une destinée sans valeur, n’est-ce pas simplement de l’inertie ?

— L’inertie, Sténio ! c’est le mal de nos cœurs, c’est le grand fléau de cet âge du monde. Il n’y a plus que des vertus négatives, nous sommes braves parce que nous ne sommes plus capables d’avoir peur. Hélas ! oui, tout est usé, même les faiblesses, même les vices de l’homme. Nous n’avons plus la force qui fait qu’on aime la vie d’un amour opiniâtre et poltron. Quand il y avait encore de l’énergie sur la terre, on guerroyait avec ruse, avec prudence, avec calcul. La vie était un combat perpétuel, une lutte où les plus braves reculaient sans cesse devant le danger, car le plus brave était celui qui vivait le plus long-temps au milieu des périls et des haines. Depuis que la civilisation a rendu la vie facile et calme pour tous, tous la trouvent