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mer et au madrépore stupide les sensations du bonheur. Et moi qui suis aussi une créature de vos mains, moi que vous aviez douée d’une apparente richesse d’organisation, vous m’avez tout retiré, vous m’avez traitée plus mal que vos anges foudroyés ; car ils ont encore la puissance de haïr et de blasphémer, et moi je ne l’ai même pas ! Vous m’avez traitée plus mal que la fange du ruisseau et que le gravier du chemin ; car on les foule aux pieds, et ils ne le sentent pas. Moi je sens ce que je suis, et je ne puis pas mordre le pied qui m’opprime, ni soulever la damnation qui pèse sur moi comme une montagne.

Pourquoi m’avez-vous ainsi traitée, pouvoir inconnu dont je sens la main de fer s’étendre sur moi ? Pourquoi m’avez-vous fait naître femme, si vous vouliez un peu plus tard me changer en pierre, et me laisser inutile en dehors de la vie commune ? Est-ce pour m’élever au-dessus de tous, ou pour